Roman de gare
« - Cest le paradis depuis que vous êtes là !
- Je pourrai très bien vous le transformer en enfer »
On lavait un peu perdu de vue, lami Claude Lelouch. Il faut dire que ses dernières réalisations navaient pas réellement enthousiasmé ni la critique ni le public, la palme revenant quand même à sa trilogie avortée « Le genre humain », dont seule la première partie, « Les parisiens » était sortie en salle. La compression des trois épisodes prévus en un seul, « Le courage daimer », navait pas sauver les meubles pour autant. Cest dire si la sortie de son nouveau film, « Roman de gare », laissait un petit peu perplexe. Dautant que le film a été tourné dans le plus grand anonymat, et quil est sorti en salle, sans réelle campagne de promotion. Bilan des courses.
« - 24 heures avant sa mort, je shampouinais Lady D.
- Comme ça elle est morte les cheveux propres ! »
Lhistoire :
Paris. La radio annonce lévasion en pleine nuit dune tueur en série pédophile. Au même moment, sur lautoroute reliant Paris à la Bourgogne, une femme, Huguette, et un homme se dispute en voiture, ce dernier abandonnant la jeune femme à la station service. Celle-ci se fait aborder par un inconnu énigmatique, qui se prétend nègre puis secrétaire de la reine du roman noir français, et qui insiste lourdement pour la conduire jusquà la prochaine ville. Huguette, qui devait présenter son fiancé à ses parents lors de son séjour, demande à linconnu de jouer le rôle de son petit ami. Encore au même moment, une femme appelle la police car son mari, professeur de collège, a disparu depuis plusieurs jours. A travers ce jeu de pistes brouillés, on se demande progressivement qui est cet énigmatique inconnu et quelles sont ses motivations
« Elle nétait juste quun petit papillon de nuit, attiré bêtement par lampoule qui allait la griller »
Comme le titre de son film l'indique, « Roman de gare », il semble que Lelouch soit revenu vers un cinéma plus populaire, plus accessible que ses derniers films. Car ce « Roman de gare », à défaut dêtre le meilleur film de Claude Lelouch, est lun de ses meilleurs depuis longtemps. Il faut dire quil sappuie sur un scénario des plus efficaces et des plus habiles, prenant un malin plaisir à brouiller les pistes jusquau bout, et à présenter des rebondissements auxquels les spectateurs ne sattendent jamais. En parallèle à cela, la construction de son film comme un roman policier dans le roman policier, puisque lune de ses héroïnes, le personnage de Fanny Ardant, est un auteur très célèbre de roman policier, est des plus intéressantes. Il propose en permanence des pistes, sur lesquels il conduit puis perd élégamment ses spectateurs pour les emmener sur dautres pistes quelques minutes après, si bien quon ne sache plus si lhistoire centrale tournée autour de Dominique Pinon est une fiction ou la réalité. On regrettera juste une fin un peu trop improbable, un peu trop embrouillé et un brin longuette, qui fait légèrement baisser le niveau général du film.
« Dès le premier regard, jai vu quHuguette était une victime comme les autres »
Si le retour du maître à un scénario plus habile et plus accessible fait du bien, on soulignera aussi un retour à une caméra plus alerte, et à des dialogues plus spontanée (comme la scène de dispute dans la voiture), qui ont fait la griffe et le succès de Lelouch.
De même, alors quil nous avait habitués à des castings pléthoriques, il semble que le retour à la simplicité se fasse également sur le choix de ses acteurs. En effet, « Roman de gare » tourne autour dun casting resserré, où seule Fanny Ardant jouit dune grande notoriété. Et pourtant, ce nest pas sa performance, où elle cabotine un peu trop, qui sera à retenir. Car cest bel et bien Dominique Pinon, qui crève lécran par sa performance toute en justesse contenue. Nouveau venu chez Lelouch, et plus habitués des films de Jeunet, Caro et consorts, il est vrai que sa venue chez Lelouch pouvait sembler improbable. Les autres rôles sont confiés à des seconds couteaux (Myriam Boyer, Michelle Bernier, Zinedine Soualem) qui livrent tous une belle performance densemble, mais aussi à une novice, Audrey Dana, aperçue seulement dans « Nos amis les terriens » de Bernard Werber (déjà produit par Lelouch, Werber fait dailleurs une apparition dans « Roman de gare »), et qui brille par le naturel de son jeu.
« Quest-ce quil y a de mieux quun crime parfait ? Deux crimes parfaits ! »
Pour conclure, le dernier film de Claude Lelouch, « Roman de gare », marque son retour à un cinéma de genre plus accessible que ses derniers films, qui avaient été marqués par des échecs critiques et publics cuisants. La réussite de ce film tient beaucoup à un scénario très intelligent, de polar dans le polar, pour lequel Lelouch semble prendre un malin plaisir à brouiller les pistes et à promener ses spectateurs. Elle tient aussi à un retour à la simplicité et à plus de spontanéité dans la forme. « Roman de gare » est à ce titre marqué par un casting resserré, où les interprètes, Dominique Pinon et Audrey Dana en tête, livrent une belle performance. Sans être son meilleur film, ce « Roman de gare » est néanmoins un bon film, à voir sans hésiter.
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