28 semaines plus tard
« Tu as 12 ans ? Tu dois être la plus jeune personne de tout le pays »
Londres. Un terrible virus a décimé lAngleterre en quelques semaines, transformant les hommes en zombies cannibales. Six mois plus tard, les autorités déclarent que le virus est endigué et que toutes les personnes contaminées sont mortes de faim. Fort dun mandat de lOTAN, les troupes américaines investissent le pays pour assurer lordre, le contrôle sanitaire et la reconstruction. Les rescapés et les réfugiés sont ainsi rapatriés et regroupés dans un même quartier de Londres, hautement protégé par les militaires. Cest là que Don, citoyen moyen qui a échappé miraculeusement mais en abandonnant sa femme et ses compagnons dinfortune à un massacre dans une cachette à la campagne, accueille ses enfants, rapatriés dEspagne où ils séjournaient lorsque les évènements ont commencé. Même sil tente de recommencer une nouvelle vie avec eux, lannonce du décès de leur mère les a profondément traumatisé. Un jour, faisant le mur au nez et à la barbe des troupes américaines, les deux enfants partent pour leur ancienne maison, où, surprise, ils tombent nez à nez avec leur mère, épuisée, qui a survécue à lattaque et qui sest cachée jusquici. Rapatriée à son tour, elle est en fait porteuse du virus mais est le premier cas avéré dhumain porteur nayant pas développé la maladie. Gardée en observation pour les chercheurs, cétait sans compter sur Don, qui pris de remords réussit à sinfiltrer dans lhôpital pour la voir. Mais à son contact il est aussitôt contaminé par le virus. Lépidémie peut alors repartir de plus belle
« - Le dernier contaminé est mort il y a six mois
- Nous nétions pas là il y a six mois »
Fort du succès de son « 28 jours plus tard » en 2003, Danny Boyle avait très envie de lui donner une suite. Cependant, ce dernier se bornera sur « 28 semaines plus tard » à ne garder quun rôle de producteur exécutif. Ni scénariste, ni réalisateur (encore quil a tourné quelques plans en dirigeant pendant trois jours la deuxième équipe), limplication de Boyle restera donc ici quelque peu limitée. Du coup, on retrouve aux manettes un petit nouveau, lespagnol Juan Carlos Fresnadillo, jeune réalisateur qui avait obtenu le Goya du meilleur jeune réalisateur pour son premier long, « Inferno » en 2003. Peu expérimenté sur ce genre de projet denvergure internationale, cétait donc un pari intéressant que de voir si Fresnadillo allait être ou non à la hauteur de lattente engendrée par cette suite.
« - Jai peur doublier comment était Maman
- Tu noublieras pas, fais-moi confiance »
Force est de constater dentrée que le film tient toutes ses promesses. Contrairement à beaucoup de suites qui passent par des casses-têtes scénaristiques pour rester cohérentes, on ne pourra quêtre satisfait devant cette vraie fausse suite, liée par le même sujet et le même rendu visuel que le premier, mais qui fonctionne aussi bien en totale indépendance du premier. Et Fresnadillo ne perd pas de temps pour nous faire entrer de plein pied dans son film et instaurer un rythme diabolique. La première scène, qui voit l'attaque d'une maison de réfugiés par des zombies est dailleurs exemplaire, montrant lhumanité dans toute sa laideur, puisque le seul survivant de lattaque ne sauve sa vie quen abandonnant sa femme et ses compagnons dinfortune aux mains (et aux crocs !) des assaillants. Et cest là grande force du scénario et du film que de sappuyer sur laspect vil des hommes. Que ce soit un père lâche qui refuse de raconter la vérité quant au sort de leur mère à ses enfants, ou des militaires qui préfèrent obéir aux ordres et massacrer une foule dinnocents devenue incontrôlable et menaçante, le comportement humain est tout aussi flippant que celui des zombies. Et des zombies il y en a un sacré paquet dans ce film ! Et cest le deuxième point positif de ce film, qui noublie jamais dêtre avant tout un vrai film de spectacle et de divertissement. Ainsi, les zombies semblent sêtre échappés massivement de chez Romero et reviennent plus violents et affamés que jamais, le réalisateur ne se privant pas non plus de nous rajouter un petit supplément (bien plaisant !) de gore au passage. Mais plus que tout, on ne peut quapprécier le message écrit en filigrane dans ce film et qui tend à dénoncer les dérives des sociétés occidentales déshumanisées. La zone fo
rtifiée des réfugiés à Londres, l'armée débordée qui ne peut plus contrôler les réfugiés, sont autant de métaphores rappelant les situations dingérences et de débordement que connaissent les armées occidentales dans le monde. Lassociation de producteurs anglais et dun réalisateur espagnol fait forcément penser plus précisément à la situation en Irak. Et le message est des plus apocalyptiques puisque obéir aux ordres revient à une destruction totale, et déserter ne sert finalement quà propager plus largement le mal et la terreur.
« On vous enferme pour vous protéger »
On ne pourra quêtre admiratif devant le gros travail accompli par Fresnadillo. Se basant sur un scénario efficace, très cohérent, et comportant plusieurs degrés de lecture, il nen oublie pas moins dappuyer le côté spectaculaire et flippant de son film à grands coups de zombies affamés, de cascades de sang, de jets de vomi ensanglanté, de cascades, de bombardement et de courses poursuites motorisées. Il nen oublie pas moins quelques traits dhumour pour offrir quelques instants de répit à ses spectateurs (les zombies qui se font défoncés par lhélicoptère), qui contrastent avec des moments beaucoup plus sombres et plus émouvants (les retrouvailles avec la mère, la scène finale contre le père, le GI qui se sacrifie en poussant la voiture). Le parti pris par Fresnadillo de jouer sur les contrastes et les oppositions est très probant et fonctionne à merveille, alternant les moments de calme et de vide dans un Londres déserté, avec des moments bruyants de cohue dans des espaces confinés (labri où ils sont parqués par les forces américaines, la rue où ils se font tous abattre). Phénomène quon retrouve avec lévasion finale qui se fait en plein jour dans une ville désespérément vide à laquelle succède une scène flippante déchappatoire dans lobscurité totale des sous-sol de Wembley. Il y a de toute évidence de réels moyens derrière ce film (il suffit de voir la scène de bombardement) mais le réalisateur a choisi intelligemment de ne pas jouer sur le côté tape-à-lil de la chose pour privilégier au contraire une image plus spontanée, plus dynamique, au plus près des personnages, calquée sur le rythme de leurs mouvements. La direction dacteur est très soignée, et linterprétation de qualité. Catherine Mc Cormack et Robert Carlyle sont irréprochables dans des rôles qui sont finalement assez courts. On retiendra surtout les jolies performances de Jeremy Renner, de la toujours très convaincante Rose Byrne, et de la jeune Imogen Poots.
« Si la phase du confinement ne marche plus, il faudra passer à la phase suivante : lextermination »
Pari réussit pour Juan Carlos Fresnadillo et Danny Boyle qui nous offrent une suite de grande qualité. Mise en scène dynamique, rythme effréné, et scénario efficace à plusieurs degrés de lecture, tous les éléments sont réunis pour faire de ce « 28 semaines plus tard » un grand film. Dautant que les effets visuels sont bien flippants et que le scénario samuse à nous maintenir sous pression jusquà une fin apocalyptique. En se servant des codes du genre et en apportant son efficacité et sa touche personnelle, Fresnadillo dépoussière quelque peu le film de zombie. La fin laisse la porte ouverte à une possible suite. Qui contrairement à ce deuxième volet surprise, serait cette fois très attendue.
Commenter cet article