Supergrave
« Je serais prêt à des choses immondes pour niquer Jules »
A quelques jours de la fin du lycée, Seth et Evan, inséparables depuis lenfance, savent quils seront séparés pour la première fois de leur vie par luniversité, tous deux nayant pas été admis dans la même fac. Si Evan est plutôt séduisant, discret et dune timidité maladive avec les filles, Seth est tout son contraire, grossier et extraverti. Aucun des deux na véritablement de succès aux yeux de la gente féminine, et le fait darriver puceaux à la fac ne les réjouit pas outre mesure. Il faut dire que la grossièreté repoussante de Seth rend le duo assez peu populaire. Et ce nest pas la compagnie de Fogell, le looser par excellence du bahut, qui va arranger les choses. Mais lorsque ce dernier se procure une fausse carte didentité, ils se retrouvent pour la première fois invités à une fête, avec la consigne dacheter de lalcool. Loccasion pour les trois daffronter leurs peurs, les filles, et la vie. Mais quand Fogell se fait embarquer par la police après avoir été agressé en achetant lalcool, les évènements senchaînent dans limprévu le plus total
« Je suis resté très discret sur ma bitomania »
Producteur, scénariste et réalisateur, Judd Appatow a été adoubé « Nouveau Roi de la comédie US » par la presse spécialisée depuis quelques mois. Bien que son hilarant « 40 ans toujours puceau », succès surprise au box-office américain, soit passé plus ou moins inaperçu lors de sa sortie en salle chez nous en 2005, lhomme faisait de nouveau parler de lui en enchaînant coup sur coup deux succès de suite au box-office américain, le premier en tant que réalisateur avec le pourtant décevant « En cloque, mode demploi », le second en tant que producteur avec ce « Supergrave ». Fort dun synopsis complètement barré (rappelant et étant comparé allégrement à celui d « American Pie », dune bande-annonce laissant présager le meilleur, et de premiers échos extrêmement favorables, le film a beaucoup fait parler de lui plusieurs mois avant sa sortie sur les sites spécialisés français, et était de ce fait la comédie la plus attendue de cet automne. Dautant que le scénario de ce film est signé par Seth Rogen (acteur des deux précédentes comédies de Appatow, il était le héros de « En cloque ») et son ami Evan Goldberg. Et en bon dénicheur de talents, Appatow a confié les rôles principaux aux jeunes et prometteurs Michael Cera et Jonah Hill, déjà très populaires dans leur pays grâce aux émissions comiques télévisées où ils font un tabac. A noter enfin que le film est réalisé par Greg Mottola, réalisateur qui a jusque là officié essentiellement pour la télé, et qui avait auparavant signé un seul long, « En route vers Manhattan » en 1997.
« - Tu nous rend un service, on te tend la main
- Le problème, cest que jai toujours ma bite dans ma main »
Ayant découvert lhilarante bande-annonce par hasard sur le Net durant lété, jétais très pressé de voir ce film, et ce dautant plus que « En cloque, mode demploi », que jattendais également, mavait franchement déçu. Mais une fois nest pas coutume, je ne suis pas ressorti totalement convaincu par ce « Supergrave », film bourré de bonnes idées et de bonnes intentions comiques, mais qui souffre de trop de défauts. A commencer par sa durée. Et ceci est un problème récurent dans les productions Appatow : on se souvient tous de la durée interminable de son « En cloque » (2h10 !) , « Supergrave », long de près de 2h, souffre du même manque de concision, qui pénalise le film par un manque récurent defficacité des situations comiques et des gros problèmes de rythme, avec dinterminables longueurs (le coup de lintervention des policiers avec McLovin dans le bar). La comédie, qui repose sur une mécanique qui doit être parfaitement huilée, doit privilégier des formats de films relativement courts pour garder son efficacité, et il serait bon que les esprits foisonnants des scénaristes de lécurie Appatow apprennent à tailler dans le gras. Dautant que la plupart des situations ne sont pas vraiment neuves. On peut adhérer ou non à « American pie », film culte signé Paul et Chris Weitz (1999), mais on doit lui reconnaître une tonalité innovante qui avait fait souffler un vent de fraîcheur sur les productions destinés aux adolescents. Malheureusement pour lui, « Supergrave » ne révolutionne pas le genre, reprenant le même goût pour les personnages de loosers attachants, la quête du Graal féminin, ou la potacherie gentille et assumée. Ce dernier point a alimenté pas mal les forums sur le film, lui reprochant sa vulgarité « repoussante ». Certes, le mot « Fuck » y est dit 186 fois, mais le tout est fait de manière très assumée et dans un esprit volontairement régressif. Et cest finalement cet esprit qui sauve le film. Bouffonnerie assumée, dialogues et répliques qui fusent et qui font mouche, le film, qui a tout du défouloir, joue habilement de lexcès et se sert des codes du genre pour au final nous éviter toute morale facile (sur le sexe ou lalcool) ou tout happy end qui aurait été malvenu. Dautre part, comme dans le modèle « American pie », « Supergrave » trouve le bon ton pour parler le plus justement possible de la jeunesse et de ce qui la tracasse, à savoir le sexe. Le film ne parle que de cela, et sur un ton pas forcément poétique, mais avec une telle volonté de ne pas se prendre au sérieux et de faire rire, que le film en devient attachant et quà défaut de hurlements de rire, il maintient un niveau tout à fait convenable de rires et de sourires.
« - Ça fait quoi de porter une arme ?
- Cest comme si javais deux bites, et que lune delles pouvait tuer »
Si le scénario se perd dans des longueurs inutiles, la mise en scène de Mottola, dun académisme absolu pour ce genre de films, manque également dénergie. En fait, latout numéro un du film est sans conteste son excellent casting. Acteurs populaires et prometteurs aux USA, inconnus au bataillon chez nous, la brochette de jeunes comédiens qui portent le film sur leurs épaules se révèle épatante. A commencer par le duo Jonah Hill et Michael Cera, qui arrivent par leur répartie, leur complémentarité et leurs mimiques, à maintenir un bon niveau de rire tout du long, et à rendre leurs personnages de loosers souvent tête à claques parfaitement attachants. A leur côté, Christopher Mintz-Plasse, pour son tout premier rôle, est une grande révélation comique. Osant tout, jouant de son physique particulier de manière totalement décomplexée, il est également un acteur à suivre. Reste lincroyable duo Bill Hader et Seth Rogen, quon retrouve en grande forme après une prestation décevante dans « En cloque ».
« Attention les gars, McLovin est dans la place ! »
Au final, petite déception quand même pour ce « Supergrave », qui avait tous les éléments pour être la comédie potache de lannée. Bonnes idées scénaristiques, capacité à oser beaucoup de choses et à parler crûment de sexe au pays du puritanisme, le film pêche au final par ses problèmes de rythme dus à sa longueur. Tout ceci est dautant plus dommage que le film pouvait compter sur un casting composé de comédiens très efficaces et très prometteurs. Alors, soyons honnêtes, on samuse bien devant « Supergrave » et les tribulations de ces gentils loosers, mais le film sent trop le déjà-vu et lhumour facile pour mériter dêtre classé avec des films beaucoup plus maîtrisés comme « Mary à tout prix », « 40 ans toujours puceau », « American pie », ou autres « Retour à la fac ». Il semble du coup un peu prématuré de décerner à Judd Appatow le titre de Gourou de la comédie américaine de ces dernières années. Attendons déjà la sortie du prochain film des frères Farrelly, « Les femmes de ses rêves », avec Ben Stiller, à la fin du mois.
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