La vengeance dans la peau
« - Acceptez-vous de participer à ce programme ?
- Je ne peux pas »
Suite (et fin ?) des aventures de Jason Bourne, lancien agent de la CIA, véritable machine de guerre faite pour tuer, toujours en quête dun passé et de son identité dont il ne sait rien. Depuis Moscou où nous lavions laissé, Bourne repart de plus belle sur la trace de son passé. La piste le mène cette fois à Londres où un journaliste enquête sur le programme secret de la CIA, « Blackbriar », destiné à fabriqué une nouvelle génération de supers agents programmés pour tuer. Mais son contact journaliste se fait assassiner sous ses yeux. Traqué, Bourne reprend lenquête là où le journaliste lavait laissé. Dune succursale bancaire à Madrid servant de couverture à un agent de la CIA impliqué dans « Blackbriar », à Tanger où il est en fuite, jusquà New York où la CIA semble plus que jamais décidée à avoir sa peau, lenquête de Bourne recommence de plus belle et semble toucher au but
« Vous êtes le point de départ. Le sale petite secret »
Très attendue, la sortie de ce troisième et dernier volet des aventures de Jason Bourne, devait conclure, du moins provisoirement une saga qui, à défaut dêtre passionnante, aura été très rentable pour les studios. Blockbuster de fin dété et dautomne, on retrouve à sa tête le réalisateur Paul Greengrass (Ours dor à Berlin en 2002 pour « Bloody Sunday », et réalisateur également de « Vol 93 » sorti en 2006), qui, sil nétait pas à lorigine du projet (le premier volet « La mémoire dans la peau », sorti en 2002, était réalisé par Liman), avait néanmoins signé le volet précédent, « La mort dans la peau » (2004). Porté par une critique enthousiaste, le film devait révéler la vérité de lidentité de Bourne et le pourquoi de sa traque. De quoi à priori en faire un succès assuré.
« Je revois les visages de tous ceux que jai tué, mais je narrive pas à me souvenir de leurs noms. Jai essayé de mexcuser pour ce que jai fait, pour ce que je suis. Mais rien ny fait »
Je nai jamais jusquici accroché à la saga « Bourne ». Cette saga, centrée sur un surhomme à la fois Jean-Claude Van Damme, Mac Gyver, et James Bond, na rien de franchement passionnante à mon sens, les tenants et les aboutissants de la quête de Bourne étant noyés dans un flot ininterrompu dactions souvent spectaculairement grotesques dont on sait à lavance quil va se sortir facilement. Et de ce point de vue-là, le film ne comporte aucune originalité par rapport aux deux opus précédents. Tout juste en met-il encore un peu plus plein la vue : des cascades et des bastons en veux-tu en voilà, une interminable scène de poursuite dans le médina de Tanger, une partie dauto-tamponneuse dans les rues de Manhattan, Greengrass crève allégrement son quota daction et dexplosions. Du côté des révélations, en revanche, il semble que léléphant ait accouché dune souris. De savoir que la manipulation est orchestrée de lintérieur par la CIA na rien de finalement très surprenant, pas plus que le revirement de comportement de Joan Allen. Reste le fait que Bourne ait été volontaire pour faire partie de cette expérimentation qui allait lui coûter sa personnalité. Lensemble nest pas trop mal amené, certes, mais avec trois films de plus de deux heures chacun, on était en droit de sattendre à quelque chose dun peu plus gros et de plus difficile à deviner. Ce qui est intéressant en revanche, cest de voir la résurgence dun genre quon croyait perdu depuis les années 70 et les grosses tensions du temps de la Guerre Froide, à savoir le film paranoïaque. Tout le monde se souviendra de films tels que « Les trois jours du Condor » (Pollack 1975), ou « Les hommes du président » (Pacula 1976), qui étaient symptomatiques dune situation de méfiance vis-à-vis des toutes puissantes institutions où pouvaient finalement se cacher lennemi. Et compte tenu de la nature des révélations finales qui nous sont faites dans ce troisième épisode (et même si le film nest pas un film politique à proprement parler, loin de là), on ne peut que le rapprocher de cette nouvelle vague paranoïaque qui émerge du cinéma américain suite au 11 septembre et à la guerre contre le terrorisme menée depuis par les USA, avec des films comme « Syriana » (Gaghan 2006) ou « Raisons détat » (De Niro 2007).
« - Bourne sait tout. Il arrive vers vous.
- Il rentre à la maison alors »
Quon aime ou quon aime pas le genre, on doit cependant reconnaître une certaine virtuosité à Paul Greengrass dans sa manière de mettre en scène les moments daction. Caméra virevoltante, au plus près des personnages dont elle capte les mouvements et les tremblements, dynamisme, ses scènes daction, bien que trop « Yamakasi », ne souffrent daucun problème de rythme, ne laissant jamais le moindre temps mort à un scénario qui tient pourtant sur un dé à coudre. On ne pourra également que senthousiasmer devant le joli casting du film, qui regroupe rien de moins que Matt Damon, Joan Allen, David Strathairn, Julia Stiles, et le vétéran et omniprésent Albert Finney. On notera également la toute petite apparition de lallemand Daniel Brülh. Bien que leurs rôles soient stéréotypés, ces grands acteurs contribuent largement à tirer le film vers le haut.
« Cest ici que tout a commencé pour moi. Et cest ici que tout se termine »
Malgré mes appréhensions, « La vengeance dans la peau » est plutôt une bonne surprise. Venant clore de manière plutôt réussie une saga un peu fade, ce dernier opus propose un divertissement au rythme enlevé, qui ne laisse jamais de temps morts aux spectateurs. Bien évidemment, les révélations qui y sont faites restent décevantes compte tenu de la longueur de la saga, mais le film fonctionne plutôt bien, du moins au premier visionnage. Si lensemble paraît à lévidence assez biodégradable une fois sorti de la salle, « La vengeance dans la peau » propose un agréable moment de cinéma pop-corn. En attendant un quatrième volet ?
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