L'invité
« - Cest qui lintégrateur de compétences ?
- Cest le gars qui intègre les compétences »
Spécialiste du film alimentaire, Gérard, la cinquantaine, est chômeur depuis trois ans. Le moral en berne, des indemnités de chômage qui baissent inexorablement, le destin semble enfin lui sourire lorsquil passe un entretien pour un poste dans un bled paumé en Indonésie. Gérard fait forte impression, et le poste lui semble promis. Mais il devra encore passer une dernière épreuve pour avoir le poste : recevoir le grand boss de la société, quil na jamais vu, à dîner chez lui. Affolés à lidée de ne pas être à la hauteur de lévénement, Colette, la femme de Gérard, supplie Alexandre, le voisin du dessus spécialiste de la communication, de prendre les choses en main. Et la tâche nest pas gagnée quand on voit lappartement et les centres dintérêt du couple : circuit de trains électriques dans tout lappartement, disques de variétés ringards, bibelots désuets. Alexandre a 24 heures pour relooker le couple et son appartement avant larrivée de linvité
.
« - Vous jouez à domicile
- Cest pas un avantage ?
- Ça dépend du domicile »
Ça faisait déjà quelques mois que la bande-annonce passait occasionnellement dans les salles obscures. Pourtant, « Linvité » sort sans que personne nen sache grand chose. La faute probablement aux choix des distributeurs de ne pas faire de projections presse. Pourtant, cette comédie était un petit événement en soit puisquelle est ladaptation dune pièce de théâtre à succès du même nom, écrite par David Pharao, et jouée en 2003 à Paris par Patrick Chesnais et Philippe Khorsand. Côté réalisation, on retrouve Laurent Bouhnik dont cest le cinquième long. On notera au passage que cette comédie est un changement radical de genre pour le réalisateur qui nous avait habitué jusque là à des sujets plus sombres et graves, tels que « Zonzon » (1998), ou « 24 heures de la vie dune femme » (2003), adaptation de Stefan Zweig portée par Agnès Jaoui.
« Après deux ans de mots fléchés tu pourrais peut-être enfin te mettre aux fiches cuisine »
La chose qui est dentrée frappante dans « Linvité », cest la volonté permanente et affichée de faire du Francis Veber, quitte à ne pas imprimer sa propre patte au film. Dailleurs, cette histoire qui se développe à huit clos sur lorganisation dun dîner mêlant des gens riches et vifs à des ringards auto satisfaits ne peut que faire penser à lillustre « Dîner de cons » (Veber 1998). Dautant que pour confondre encore un peu plus les pistes, Bouhnik pousse jusquà compter dans son casting Thierry Lhermitte (déjà au casting du « Dîner de cons »), et Daniel Auteuil, lui aussi habitué des films de Veber (« Le placard » en 2003 où il jouait déjà avec Lhermitte, et « La doublure » (2006)), mais aussi des mauvaises comédies ratées imitations Veber (« Mon meilleur ami » - Leconte (2006)). Et le spectacle qui commence sous nos yeux est franchement indigent. Il faut dire que le scénario na rien de franchement original : les évènements sont archi prévisibles, et les ressorts comiques quels quils soient (bons mots, quiproquos ou situations) sont largement éculés et éventés. On néchappe ainsi pas à la méprise sur lidentité de linvité, ni au coup de théâtre des apparences (Lhermitte est en fait chômeur), ni aux réparties les plus faciles (« Un disque de Cloclo, pour vous griller un candidat, cest comme un sèche cheveu dans une baignoire », sans parler de la confusion grosse comme une montagne entre le vin dappellation « Cote-Rotie » et la côte rôtie présentée finalement par Lemercier. Jusquau bout, on se dit « non, il ne va pas oser la faire celle-là ». Et finalement si
). Si quelques situations ou répliques nous tirent quand même un sourire gêné, le constat reste franchement affligent.
« Un soufflet pour un dîner aussi important, je trouve ça gonflé »
Sur la forme, pas grand chose à ajouter qui pourrait sauver quelque peu le film. Bouhnik assure ici le minimum syndical, la réalisation semblant là encore calquée sur celle de Veber. Mais le résultat est ici poussif et fainéant. La direction dacteurs nest pas non plus le point fort du film, ceux-ci se contentant de surjouer, comme sil interprétait une sorte de parodie de ce film ! Lhermitte est dans lexcès absolu et semble finalement à côté de ses pompes, alors que Lemercier fait une nouvelle fois du Lemercier, à savoir la gentille nunuche franchement cruche. Reste Auteuil, qui sen sort finalement pas si mal, mais qui interprète pour la énième fois ce rôle de con un peu fade.
« Tas 52 ans, faut arrêter de se contenter de faire des tours de manège. Maintenant faut attraper la queue du Mickey »
Les films de comédie made in France semblent connaître un essoufflement faute de renouvellement. « Linvité » est en cela symptomatique. A limage de films récents comme « Mon meilleur ami », « La doublure », « La maison du bonheur », « Lantidote », ou encore « Lentente cordiale », qui reposent sur des schémas classiques dopposition de personnages aux caractères très différents et un humour très grand public, gentillet, et surtout politiquement correct, les ressorts comiques sont trop éculés, trop prévisibles, et une certaine facilité, sorte de recherche du moindre effort, semble du coup en découler. Comédie sous-Véberienne par excellence, « Linvité » ne sera au final quun énième vaudeville sans saveur. On est libre dy adhérer. Ou pas.
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