Oceans Thirteen
« - Si tu veux laisser une trace, ya qua donner ton nom à une avenue.
- On reparlera de ça quand je serais mort »
A lorigine, avant George Clooney et Brad Pitt, il y avait un vieux film nommé « Oceans eleven », ou « Linconnu de Las Vegas » en français. Réalisé par Lewis Milestone en 1961, ce film réunissait toute la « Rat Pack » de lami Sinatra, à savoir Sinatra lui-même, Dean Martin, Sammy Davis Jr., ou encore Peter Lawford, soit une affiche de rêve pour lépoque. En réalisant le remake de ce film en 2002, Steven Soderbergh nous offrait une version encore plus glamour avec rien de moins que Clooney, Pitt, Damon, Julia Roberts, ou encore Cheadle aux manettes. Private jokes et ambiance cool avaient ravi le public, créant une surprise et un succès planétaire.
On suivit « Oceans twelve » (2005), projet encore plus ambitieux et décontracté, et enfin donc « Oceans thirteen », dernier opus sorti cette semaine sur nos écrans. En reprenant les mêmes, plus Al Pacino dans le rôle du méchant, le film annonçait un casting plus grand encore quà laccoutumée. Evènement mondial en perspective donc. Retour sur un film décevant.
« Ya un code entre les mecs qui ont serré la main de Sinatra »
Lhistoire :
Reuben, mécène des coups faramineux de Danny Ocean sassocie à Willy Bank, crapule notoire qui veut construire le casino le plus luxueux de Las Vegas. Malheureusement, une crapule comme Bank ne déroge jamais à ses travers et escroque en beauté Reuben qui finit par faire une crise cardiaque. Entre la vie et la mort, léquipe de Danny se réunit et décide, afin de venger Reuben, de mettre en branle un projet visant à voler les recettes de la soirée inaugurale du casino de Bank, et de réduire sa réputation en miettes. Mais ce dernier, totalement mégalo et parano, exerce un contrôle minutieux de son casino et la sécurité est une nouvelle fois la plus moderne et infaillible du monde. Nouveau défi en perspective pour nos amis, qui va nécessiter le soutien financier de Terry Benedict, lennemi de toujours, qui voit dun mauvais il la création de ce mastodonte du jeu faisant de lombre à ses propres casinos
« - Tu es un nabot dans 34 états.
- Et un animal dans les 34 autres »
Ya pas à dire, sur le papier tous les éléments étaient réunis pour faire de ce film une réussite totale : budget gargantuesque, décors et effets spéciaux et veux-tu en voilà, et le tout porté par la crème des acteurs du moment. Mais voilà, au bout du troisième épisode il semble que la recette sessouffle sérieusement et que les scénaristes narrivent plus franchement à se renouveler. Car cest avant tout un manque doriginalité totale qui vient plomber ce troisième opus. Le casse dans le casino le plus sécurisé du monde ressemble trait pour trait à celui du premier épisode, à lexception faite que les rebondissements sont de moins en moins plausibles et de plus en plus incompréhensibles. En effet, il vous faudra vous armer dune attention à toute épreuve (pour un film dépassant les 2h de durée) pour comprendre les subtilités du scénario tant les plans et les astuces de la bande à Danny senchaînent sans que personne ne comprenne bien comment ils senchaînent. Car si les plans de Soderbergh sont toujours aussi léchés, si lhumour est bien présent, et si on retrouve certaines joutes verbales entre nos braqueurs armés de leur cool attitude, le scénario demeure elliptique, et certains retournements de situation arrivent sans quon sache ni pourquoi ni comment. Dommage.
Ainsi, deux de nos braqueurs infiltrés dans une usine de dés mexicaine, mènent tambour battant une grève pour la revalorisation salariale des employés sans que cela apporte quelque chose dintéressant au scénario, et sans que cela soit bien traité de manière à ce que cela apporte quelque chose au scénario. Dans le même genre, la partie consistant à voler les diamants de Bank est très elliptique, et même si elle semble logique à la fin, lhabile tour de passe-passe tombe comme sur cheveu sur la soupe pas très clair. Et je ne parlerais pas de larrestation de Livingston en plein casino, car jai beau me creuser, je nai toujours pas compris ni comment ni pourquoi elle avait lieu. Ni comment il était relâché. Et pour cacher les lacunes de la trame historique, les scénaristes nont rien trouvé de mieux à faire que de nous sortir la grosse artillerie des effets spéciaux, avec limprobable séisme simulé par la foreuse du tunnel sous la manche. Bref, beaucoup de gros artifices, de gros moyens, pour un résultat qui aurait pu être bien plus convaincant.
« Je connais tous les types que vous pourriez embaucher pour me faire la peau, mais ils me préfèrent à vous »
Au-delà de ça on retrouve avec un plaisir évident la joyeuse troupe de Danny Ocean, même si on aurait bien aimé retrouver également Julia Roberts dont le personnage, qui avait apporté beaucoup de piquant au deuxième opus, a totalement disparu de la circulation. En revanche les nouveaux venus ne sont pas toujours convaincants. Al Pacino cabotine à mort dans son rôle de patron-maffieux despotique, Ellen Barkin se débat dans un rôle caricatural à souhait qui nest pas taillé pour elle, et surtout Vincent Cassel apparaît trois fois dans le rôle du con de service, ce qui est décevant quand on connaît le talent de cet acteur. Ajoutons à cela une mise en scène à la Soderbegh, cest-à-dire toujours aussi fluide avec des effets bien léchés. Reste quil se repose sur les bases quil avait lui-même posé lors des deux précédents épisodes, et quil a laissé sa créativité au garage le temps du tournage de celui-ci.
Au final, si on retrouve avec joie la folle et glamour équipe de Danny Ocean pour sa troisième aventure, on est quelque peu déçu de la tournure des évènements. Si lambiance décontractée et cool est toujours présente, si lhumour générale et la sympathie qui réside dans les dialogues décalés fait toujours mouche, on regrette malgré tout que les scénaristes aient été aussi peu inspirés, se contentant du minimum syndical pour assurer la rentabilité du troisième opus dune franchise dont la mécanique bien huilée semble sessouffler. On appréciera le petit message très « Clooneysque » qui se dessine dans le film, à savoir que certains font des millions sur les casinos et les jeux quand le reste de la planète vit dans la pauvreté et lindifférence (importance du coup de la grève au Mexique et du don indirect de Benedict aux bonnes uvres). A défaut dêtre un gros navets, le film divertit toujours mais nempêche pas un sentiment de déception. Dans ces conditions, il serait préférable de ne pas envisager d « Oceans 14 ».
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